Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu/341

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l’état où sont chez eux les arts et les sciences. Quelque pénible que soit ce que vous exigez, vous avez trop d’empire sur mon cœur pour que je puisse vous le refuser. La sincérité, dont j’ai toujours fait gloire, vous sera garant de la vérité des faits que j’avancerai ; et, s’il en est quelqu’un qui vous paraisse douteux, vous verrez aisément, en approfondissant, que je ne l’ai écrit qu’après l’avoir mûrement examiné.

Je commencerai par les Italiens. Leur pays est le centre et la patrie des arts ; c’est chez eux que la peinture, la sculpture et l’architecture se sont dépouillées de cette barbarie dans laquelle les Goths et les Vandales les avaient plongées. La tranquillité dont les états du pape jouissaient avant Charles-Quint, avait favorisé l’avancement et pour ainsi dire la perfection des arts. La rapidité avec laquelle ils furent portés au plus haut degré est surprenante. Pierre Perugin, maître de Raphaël, avait lutté pendant un temps contre le mauvais goût ; mais n’ayant pas assez d’imagination ni de génie pour le surmonter entièrement, ses tableaux, où on voyait éclater des beautés inconnues jusqu’alors, étaient remplis de mille défauts. La peinture était