Page:Argens - Thérèse philosophe (Enfer-402), 1748.djvu/171

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HISTOIRE

DE
MADAME
BOIS-LAURIER.


Tu vois en moi, ma chere Théreſe, un Etre ſingulier. Je ne ſuis ni homme, ni femme, ni fille, ni veuve, ni mariée. J’ai été une libertine de profeſſion, & je ſuis encore pucelle. Sur un pareil début, tu me prens ſans doute pour une folle ; un peu de patience, je te prie, tu auras le mot de l’énigme. La nature capricieuſe à mon égard a ſemé d’obſtacles inſurmontables la route des plaiſirs qui font paſſer une fille de ſon état à celui de femme : une membrane nerveuſe en ferme l’avenue avec aſſez d’exactitude pour que le trait le plus délié que l’amour ait jamais eu dans ſon carquois n’ait pu atteindre le but, & ce qui te ſurprendra