Page:Argens - Thérèse philosophe (Enfer-402), 1748.djvu/20

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
4
Thérèse

tendre enfance, on ne m’a parlé que d’amour pour la vertu & d’horreur pour le vice. „ Vous ne ſerez heureuſe, me diſoit-on, qu’autant que vous pratiquerez les vertus chrétiennes & morales : tout ce qui s’en éloigne eſt le vice ; le vice nous attire le mépris, & le mépris engendre la honte & les remords qui en ſont une ſuite. ” Perſuadée de la ſolidité de ces leçons, j’ai cherché de bonne foi, juſqu’à l’âge de vingt-cinq ans, à me conduire d’après ces principes : nous allons voir comment j’ai réuſſi.

je ſuis née dans la Province de Vencerop. Mon pere étoit un bon Bourgeois ; Négociant de… petite Ville jolie, où tout inſpire la joie & le plaiſir ; la galanterie ſemble y former ſeule tout l’interêt de la ſociété. On y aime, dès qu’on penſe, & on n’y penſe que pour ſe faciliter les moyens de goûter les douceurs de l’amour. Ma mere, qui étoit de… ajoutoit à la vivacité de l’eſprit des femmes de cette Province, voiſine de celle de Vence-