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Page:Argis - Sodome, 1888.djvu/102

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SODOME.

longue contrainte, il jura qu’il était fatigué de ses entretiens avec lui-même et avec Dieu !

Elle était là, envoyée avec un à-propos miraculeux par une Providence charitable, cette Ruth qu’il avait autrefois tant appelée, et dont il avait cru pouvoir se priver, dans son orgueil et son absurde outrecuidance !

Jacques s’approcha comme nonchalamment, timide et tremblant.

Parlerait-il, essaierait-il de percer le mystère qui certainement faisait vivre une femme dans un tel pays, ou, plutôt, pourquoi supposer un mystère quand peut-être cette retraite n’avait que des causes très simples, le besoin de repos, des vacances, par exemple ! Pourtant, avec cet instinct, une seconde vue, une acuité exquise de l’esprit qu’il devait à sa diète et qui le trompait rarement, il devinait que sa première supposition était juste…

Il avait maintenant un désir très ferme de parler à cette femme, mais, avec une crainte d’enfant vierge, il n’osait.

Il osa pourtant une chose bien audacieuse, peut-être bien indiscrète : n’est-ce pas là le propre des timides ? Ils tremblent, ils sont indécis, et, brusquement, pour l’étonnement des observateurs, ils franchissent d’un seul bond les