Page:Aristophane - Théâtre 1889 tome 2.djvu/156

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LE MAGISTRAT.

Mais il t’en eût coûté, si tu n’avais pas gardé le silence.

LYSISTRATA.

Aussi savais-je me taire. Mais un beau jour que je voyais prendre le parti le plus déplorable, je dis : « Mon ami, comment se fait-il que tu te comportes si follement ? » Il me répliqua sur-le-champ, en me regardant de travers : « Si tu n’ourdis ta trame, tu t’en ressentiras longtemps. La guerre est l’affaire des hommes. »

LE MAGISTRAT.

Il avait bien raison.

LYSISTRATA.

Comment, misérable, il avait raison ? Il ne nous sera pas permis de vous avertir lorsque vous prenez des délibérations absurdes ? Et cependant, lasses de vous entendre répéter dans tous les coins des rues qu’il n’y avait plus d’hommes dans l’État, qu’il n’y en avait en vérité pas un seul, il a pris fantaisie aux femmes de se réunir pour sauver la Grèce. A quoi aurait servi plus de longanimité ? Si vous daignez écouter nos conseils sensés et demeurer en repos à votre tour, nous pourrons rétablir vos affaires.

LE MAGISTRAT.

Vous, nos affaires ? Oh ! cela est trop fort ! Silence !

LYSISTRATA.

Silence !

LE MAGISTRAT.

Ô méchante bête, prétends-tu me faire taire ? Toi, surtout, avec ton voile sur ta tête ? Que je meure plutôt.