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Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/1070

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d’une manière générale? Et quel caractère doit-il avoir ? Pour le dire en un mot, l’homme courageux est celui qui ne l’est pour aucun des motifs qu’on vient de citer, mais qui l’est parce qu’il est bien de l’être, et qui est courageux toujours, soit que quelqu’un le regarde, soit que personne ne le voie. Ceci ne veut pas dire que le courage se produise absolument sans passion et sans motif ; mais il faut que l’impulsion vienne de la raison: qui montre que c’est là le bien et le devoir. Ainsi, l’homme qui, par raison et pour remplir son devoir, marche au danger, sans rien craindre de ce danger, celui-là est courageux ; et le courage exige précisément ces conditions.

§ 11. Mais on ne doit pas comprendre que l’homme courageux est sans crainte, en ce sens qu’il serait accidentellement hors d’état de sentir la moindre émotion de peur. Ce n’est pas être courageux que de ne craindre absolument rien du tout, puisqu’à ce compte on irait jusqu’à trouver que la pierre et les choses inanimées sont courageuses. Pour avoir vraiment du courage, il faut savoir craindre le danger et savoir le supporter ; car si on le supporte sans le craindre, ce n’est plus là être courageux.

§ 12. En outre, ainsi que nous l’avons établi plus haut, en divisant les espèces de courage, le courage ne s’applique pas à toutes les craintes,