Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/1196

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

l'amitié véritable, si l'on a de plus la volonté de faire tout le bien qu'on pourra, dans l'occasion, à celui qui inspire cette bienveillance spontanée. La bienveillance vient du coeur et s'adresse au coeur d'un être moral. On ne dira jamais qu'on est bienveillant pour le vin ou pour toute autre chose inanimée, toute bonne, toute agréable qu'elle peut être. Mais on a de la bienveillance pour quelqu'un, parce qu'on lui reconnaît un coeur honnête.

§ 12. Comme la bienveillance n'est pas sans quelque amitié et qu'elle s'applique au même être, c'est ce qui fait qu'on la prend souvent pour de l'amitié réelle.

§ 13. La concorde, l'accord des sentiments se rapproche beaucoup de l'amitié, si l'on prend ce mot de concorde dans son vrai sens. Par ce qu'on admet les mêmes hypothèses qu'Empédocle, et que l'on croit des éléments de la nature ce qu'il en croit lui-même, peut-on dire pour cela qu'il y ait concorde entre vous et Empédocle ? Et de même pour toute autre supposition de ce genre.

§ 14. D'abord, il n'y a pas concorde dans les choses de pensée; il n'y en a que dans les choses d'action ; et encore dans celles-ci, il n'y a pas concorde en tant qu'on est d'accord à penser la même chose, mais en tant que, pensant la même chose, on prend la même résolution sur les choses dont on pense ainsi. Si, par exemple, deux personnes pensent à la fois à jouir du pouvoir, l'une pour elle seule, et l'autre pour elle-même également, peut-on