Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/1230

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§ 3[1]. Mais quant aux autres animaux, qui sont tous inférieurs à l’homme, ils ne peuvent jamais en rien participer à cette désignation ni recevoir ce nom. On ne dit pas que le cheval, l’oiseau, le poisson sont heureux ; pas plus qu’aucun de ces êtres qui n’ont point dans leur nature, comme leur nom seul l’indique, quelque chose de divin, mais qui vivent d’ailleurs plus ou moins bien, en ayant leur part en quelqu’autre manière des biens répandus dans le monde. § 4[2]. Nous prouverons plus tard qu’il en est ainsi. Mais nous nous bornons maintenant à dire que pour l’homme il y a certains biens qu’il peut acquérir, et qu’il en est d’autres qui lui sont interdits. Nous entendons par là que, de même que certaines choses ne sont point sujettes au mouvement, de même il y a des biens qui ne peuvent pas non plus y être soumis ; et ce sont peut-être les plus précieux de tous par leur nature. Il est en outre quelques-uns de ces biens qui sont accessibles sans doute, mais qui ne le sont que pour des êtres meilleurs que

  1. Ni recevoir ce nom. C’est par un abus de mots qu’on peut dire de quelques animaux domestiques qu’ils sont heureux, par l’existence que l’homme leur assure. — En ayant leur part… des biens répandus dans le monde. Pensée délicate et vraie, autant que profonde.
  2. Nous prouverons plus tard. Il n’y a rien dans la Morale à Eudème qui se rapporte à ceci ; et je ne crois pas que cette question, d’ailleurs si intéressante, ait été traitée dans aucun ouvrage d’Aristote. C’est aussi l’avis de M. Spengel dans sa dissertation sur les écrits moraux d’Aristote, Mémoires de l’académie des sciences de Bavière, tome III, p. 491. M. Fritssch dans son édition croit que ceci se rapporte au livre VI de la Morale à Eudème, ch. 14, § 7 ; mais ce passage évidemment n’est pas en rapport avec la discussion qu’on annonce ici. Pour l’homme il y a certains biens. Appréciation très saine des limites imposées à la nature de l’homme. — Ce sont peut-être les plus précieux. Il eût été bon de préciser quels peuvent être ces biens. Est-ce l’immortalité par exemple ? — Pour des êtres meilleurs que nous. Les Dieux sans doute.