Aller au contenu

Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/440

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
28
MORALE À NICOMAQUE.

petit des biens pour le rendre encore plus désirable ; car alors ce qu’on y ajoute fait une somme de biens supérieure et incomparable, puisqu’un bien plus grand est toujours plus désirable qu’un moindre bien. Ainsi donc le bonheur est certainement quelque chose qui est définitif, parfait, et qui se suffit à soi-même, puisqu’il est la fin de tous les actes possibles à l’homme.

§ 9. Mais peut-être tout en convenant avec nous que le bonheur est sans contredit le plus grand des biens, le bien suprême, peut-on désirer encore d’en connaître plus clairement la nature.

§ 10. Le plus sûr moyen d’obtenir cette complète notion, c’est de savoir quelle est l’œuvre propre de l’homme. Ainsi de même que pour le musicien, pour le statuaire, pour tout artiste, et en général pour tous ceux qui produisent quelque œuvre et qui agissent d’une façon quelconque, le bien et la perfection, ce semble, sont dans l’œuvre spéciale qu’ils accomplissent ; de même, à ce qu’il paraît, l’homme doit trouver le bien dans son œuvre propre, si toutefois il est une œuvre spéciale que l’homme doive accomplir. § Il. Mais est-ce que par hasard quand le maçon, le tourneur, etc., ont une œuvre spéciale et des actes propres, l’homme seul n’en aurait pas ? Serait-il condamné par la nature à l’inaction ? Ou plutôt de même que l’œil, que la main, que le pied, et en général que chaque partie du corps remplit évidemment une fonction spéciale, de même n’est-il pas à croire que l’homme, indé-