Page:Aristote - La Politique.djvu/22

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roture. C’est croire que de parents distingués sortent des fils distingués, de même qu’un homme produit un homme, et qu’un animal produit un animal. Mais il est vrai que bien souvent la nature veut le faire sans le pouvoir.

§ 20. On peut donc évidemment soulever cette discussion avec quelque raison, et soutenir qu’il y a des esclaves et des hommes libres par le fait de la nature ; on peut soutenir que cette distinction subsiste bien réellement toutes les fois qu’il est utile pour l’un de servir en esclave, pour l’autre de régner en maître ; on peut soutenir enfin qu’elle est juste, et que chacun doit, suivant le vœu de la nature, exercer ou subir le pouvoir. Par suite, l’autorité du maître sur l’esclave est également juste et utile ; ce qui n’empêche pas que l’abus de cette autorité ne puisse être funeste à tous deux. L’intérêt de la partie est celui du tout ; l’intérêt du corps est celui de l’âme ; l’esclave est une partie du maître ; c’est comme une partie de son corps, vivante, bien que séparée. Aussi entre le maître et l’esclave, quand c’est la nature qui les a faits tous les deux, il existe un intérêt commun, une bienveillance réciproque ; il en est tout différemment quand c’est la loi et la force seule qui les ont faits l’un et l’autre.

§ 21. Ceci montre encore bien nettement que le pouvoir du maître et celui du magistrat sont très distincts, et que, malgré ce qu’on en a dit, toutes les au-