Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/171

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et d’autres où c’est le défaut : ainsi, par rapport au courage la témérité, qui pèche par excès, n’est pas ce qui s’en éloigne le plus ; c’est la lâcheté, qui pèche par défaut : au contraire, l’insensibilité, qui pèche par défaut, est moins éloignée de la tempérance, que la débauche, qui pèche par excès.

Cela vient de deux causes : l’une, qui est dans la nature même de la chose ; car, précisément parce qu’un des deux extrêmes est plus près du milieu et lui ressemble plus, ce n’est pas celui-là que nous lui opposons : mais plutôt l’extrême contraire. Ainsi, parce que la témérité ressemble plus au courage que la lâcheté, c’est plutôt celle-ci que nous lui opposons : car les extrêmes plus éloignés du milieu paraissent plus contraires. Telle est donc l’une des causes, prise dans la nature de la chose. L’autre est en nous-mêmes ; car nous regardons comme plus opposées au juste milieu, les dispositions auxquelles nous nous sentons plus naturellement enclins. Ainsi, nous avons reçu de la nature plus de penchant pour les plaisirs, et par conséquent nous sommes plus disposés à une vie molle et voluptueuse, qu’à une vie sobre et réglée. Nous appelons donc plutôt opposées, ou contraires, les choses pour lesquelles notre entraînement est plus grand ; et c’est pour cela que l’intempérance, qui est un excès, est plus opposée, ou plus contraire, à la tempérance.

IX. Nous avons suffisamment fait voir comment la vertu est un certain milieu entre deux vices, l’un par excès, l’autre par défaut, et qu’elle est telle,