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Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/173

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moins dangereux, à quoi on parviendra surtout de la manière que nous avons dite. On doit, de plus, observer vers quels objets on se sent le plus porté : car les uns ont naturellement plus de penchant pour une chose, les autres pour une autre, et c’est ce qu’on reconnaîtra par le plaisir ou par la peine qu’on ressent ; il faut alors se diriger en sens contraire, car c’est en nous écartant le plus possible de l’excès vicieux, que nous nous approcherons du milieu désiré, comme font ceux qui entreprennent de redresser un bois tortu. Mais il faut surtout se garantir, en tout genre, des choses qui donnent du plaisir, car nous n’en jugeons jamais sans partialité. Nous devons donc nous tenir, à l’égard de la volupté, dans les mêmes sentiments que les vieillards troyens à l’égard d’Hélène[1], et lui appliquer, dans tous les cas, le langage que leur prête le poète ; car c’est ainsi que, parvenant à la congédier, nous serons moins exposés à tomber dans de funestes égarements.

Voilà donc, pour le dire en peu de mots, ce que nous devons faire pour parvenir au juste milieu ; mais c’est peut-être une tâche difficile, surtout

    employée ici par Aristote, et au sujet de laquelle on peut consulter les Remarques de Mr Coray, sur Héliodore (t. 2, p. 31 de son édition.)

  1. Allusion aux vers 159 et suiv. du 3e chant de l’Iliade d’Homère, lorsque les vieillards assis avec Priam sur les remparts de Troie, voient arriver Hélène, à qui le roi demande de lui faire connaître les héros grecs qu’il voit occupés à ranger leurs soldats dans la plaine.