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Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/288

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personne ; ceux de douceur et de bienveillance, comme de ne frapper et de n’injurier personne ; et ainsi de tous les autres vices et de toutes les autres vertus, défendant de certaines actions, et en ordonnant plusieurs autres ; avec raison, dis-je, quand elle a été faite comme elle doit l’être, et moins bien quand elle a été faite à la hâte, et comme improvisée.

La justice est donc une vertu accomplie, non pas dans un sens absolu, [et considérée dans l’homme pris isolément], mais dans les rapports qu’il peut avoir avec ses semblables. Aussi est-elle communément regardée comme la plus importante de toutes les vertus ; ni l’astre du soir, ni l’étoile du matin, n’inspirent autant d’admiration ; et la maxime d’un poète qui dit que dans la justice sont comprises toutes les vertus[1], est devenue proverbe parmi nous.

C’est surtout parce qu’elle est l’exercice d’une vertu parfaite, que la justice est elle-même parfaite ; et elle est telle, parce que celui qui la possède peut en faire usage pour les autres, et non pas seulement pour son propre avantage. Car plusieurs peuvent faire servir la vertu à leur propre utilité, mais non l’employer à l’utilité des autres.

  1. C’est la pensée qu’exprime le vers 149e du recueil qui nous reste sous le nom de Maximes ou Sentences de Théognis. La comparaison poétique qui précède immédiatement cette citation, et qui paraît avoir été usitée proverbialement du temps d’Aristote, est peut-être aussi une allusion a des vers de quelque poète.