Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/290

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bitude se rapporte au bien ou à l’avantage des autres, elle est la justice.

II. Mais nous cherchons ce que c’est que la justice, en tant qu’elle est une partie de la vertu (car il y a, suivant nous, une telle vertu particulière), et nous voulons savoir aussi ce que c’est que l’injustice envisagée sous le même point de vue. Ce qui prouve qu’elle existe en effet, c’est qu’un homme dont les actions sont vicieuses sous d’autres rapports, agit, à la vérité, contre la justice, mais sans qu’il en résulte pour lui aucun profit, aucun avantage. Par exemple, s’il jette son bouclier en prenant la fuite, par lâcheté ; s’il parle mal de quelqu’un, par animosité ; si, par avarice, il refuse de l’argent à quelqu’un qui en a besoin. Au lieu que, lorsqu’il cherche son profit ou son avantage, ce n’est souvent par aucune des passions vicieuses dont on vient de parler ; ce n’est surtout pas par toutes à la fois : mais il y a dans sa conduite un vice particulier ; et c’est parce qu’elle est contraire à la justice, que nous la blâmons. Il y a donc une sorte d’injustice particulière, qui est, pour ainsi dire, une partie de l’injustice, en général, ou prise dans un sens absolu ; il y a l’injuste considéré spécialement, et qui diffère de l’injuste proprement dit, qui est la violation de la loi.

Supposons encore qu’un homme entretienne un commerce adultère, en vue du gain qu’il lui rapporte, et du prix qu’il en reçoit, tandis qu’un autre ne s’y livre que pour satisfaire sa passion, et que même il y dépense de l’argent : celui-ci