Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/342

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quelque motif : non pas motif pris dans un sens absolu et indéterminé, mais de manière qu’il en résulte une action qui ait un résultat et un auteur, et qu’il ne soit pas une simple tendance à agir. Car la vertu, la bonne conduite, est une fin, un but, et le but est l’objet du désir.

De là vient que la préférence est ou intelligence excitée par le désir, ou désir déterminé par la réflexion : et un tel principe est l’homme lui-même. Au reste, rien de ce qui est passé ne peut être un objet de préférence : ainsi personne ne préfère d’avoir contribué à la ruine de Troye ; car on ne délibère pas sur ce qui a été fait, mais sur ce qui doit ou peut se faire ; et ce qui a été fait ne peut pas ne l’avoir pas été ; aussi le poète Agathon dit fort bien à ce sujet : « Le seul pouvoir qui manque à la Divinité, c’est de faire que ce qui a été accompli ne le soit pas. »

La vérité est donc l’œuvre ou le produit des deux parties intelligentes de l’âme ; et les propriétés qui les caractérisent l’une et l’autre, sont les habitudes ou les dispositions en vertu desquelles chacune d’elles saisit le mieux la vérité.

III. Mais il faut revenir sur ces propriétés distinctes, et reprendre la question de plus haut. Admettons que les moyens à l’aide desquels l’âme saisit la vérité, par affirmation ou négation, soient au nombre de cinq : l’art, la science, la prudence, la sagesse, l’intelligence ; car le préjugé et l’opinion peuvent induire à erreur. Or, si l’on veut parler un langage exact et précis, et ne pas s’attacher à