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Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/378

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peuvent quelquefois s’élever au rang des dieux par l’excès de la vertu, cette disposition doit apparemment être en eux l’opposé de la férocité. Et de même qu’on ne saurait dire que la bête féroce soit susceptible de vice ou de vertu, de même on ne saurait le dire d’un dieu ; mais sa vertu doit être quelque chose de plus auguste que ce que l’on appelle communément de ce nom, comme la férocité est quelque autre chose que le vice. Mais comme c’est un être fort rare qu’un homme divin (comme parlent les Lacédémoniens[1], quand ils ont une grande admiration pour quelqu’un), c’est aussi une chose rare dans la nature qu’un homme féroce ; on ne le trouve guère que chez les barbares. Quelques-uns aussi le deviennent par l’effet des maladies, ou de quelque dégradation des facultés de l’âme, et c’est souvent une expression injurieuse qu’on applique aux hommes qui donnent dans quelque excès vicieux. Mais j’aurai occasion de revenir sur ce sujet[2], et j’ai déjà parlé plus haut du vice. C’est de l’intempérance, de la mollesse et de la débauche que je dois parler à présent, et aussi de la tempérance et de la force morale. Car, on ne doit les considérer ni comme des dispositions qui soient absolument les mêmes que la vertu, ou que le vice, ni comme formant, pour ainsi dire, une espèce

  1. Voyez le Ménon de Platon (p. 389, éd. Bipont), où cette façon de s’exprimer est attribuée plus particulièrement aux femmes lacédémoniennes.
  2. Dans les chapitres 5e et 6e de ce livre.