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Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/381

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accordent une partie de la proposition, et non l’autre : ils conviennent qu’il n’y a rien qui ait plus de force que la science ; mais ils n’accordent pas qu’aucun homme ne puisse avoir une conduite opposée à celle qui, dans son opinion, serait meilleure. Et, par cette raison, ils soutiennent que l’intempérant se laisse maîtriser par les voluptés, parce qu’il a, non pas la science, mais seulement l’opinion [de ce qu’il faut faire].

Cependant, si c’est, en effet, une simple opinion, et non une science certaine ; si ce n’est pas une forte persuasion qui s’oppose [à l’action de l’intempérant], mais un faible soupçon, comme il arrive en cas de doute, on peut lui pardonner de ne s’y pas attacher, surtout quand il est entraîné par de violents désirs : mais on doit être sans indulgence pour la perversité, et en général pour tout ce qui est véritablement blâmable. [Si l’homme prudent se livre à l’intempérance,] ce sera donc en dépit de la prudence, qui est pourtant ce qui a le plus de force ; mais cela est absurde : car [alors il faudra dire] que le même homme est à la fois prudent et intempérant ; et assurément personne n’oserait soutenir qu’il soit d’un homme prudent, de faire à dessein les actions les plus répréhensibles. D’ailleurs, il a été démontré précédemment que c’est surtout dans l’action que se manifeste la prudence, puisque cette vertu est une des plus importantes, et qu’elle comprend toutes les autres[1]. De plus,

  1. « Elle se rapporte aux actions particulières, et comprend