Page:Aristote Metaphysique 1840 1.djvu/260

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unités. Tous les êtres sont, ou un seul être, ou une multitude d’êtres, si chaque être est unité[1].

Ce n’est pas tout encore. Si l’unité était indivisible, il n’y aurait absolument rien, et c’est ce que pense Zénon[2]. En effet, ce qui ne devient ni plus grand quand on lui ajoute, ni plus petit quand on lui retranche quelque chose, n’est pas, selon lui, un être, car la grandeur est évidemment l’essence de l’être. Et si la grandeur est son essence, l’être est corporel, car le corps est grandeur dans tous les sens. Or, comment, ajoutée aux êtres, la grandeur rendra-t-elle les uns plus grands, sans produire cet effet sur les autres ? Par exemple, comment le plan et la ligne grandiront-ils, et jamais le point ni la monade ? Toutefois, comme la conclusion de Zénon est un peu dure[3], et que d’ailleurs il peut y avoir quelque chose d’indivisible, on répond à l’objection que, dans le cas de la monade et du point, l’addition n’augmente pas l’étendue, mais le nombre. Mais alors, comment un seul ou même plusieurs êtres de cette nature formeront-ils une grandeur ? Autant vaudrait prétendre que la ligne se compose de points. Que si l’on

  1. Dans la première supposition, il n’y a évidemment qu’une unité, l’unité en soi ; dans l’autre hypothèse, comment constituer la deuxième unité, avec une multitude d’unités ?
  2. D’Élée, disciple et ami de Parménide, dont il poussa les principes à leurs dernières conséquences. Voyez la dissertation de M. Cousin sur Zénon, Fragm. historiq., p. 96 sqq.
  3. Θεωρεῖ φορτιϰῶς. Argyropule traduit : Inepte admodum contemplatur. Aristote n’est pas si sévère que cela pour Zénon. Nous avons préféré l’interprétation plus équitable de Bessarion et du vieux traducteur latin.