Page:Aristote Metaphysique 1840 1.djvu/83

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est l’élément préexistant dans lequel la forme se réalise, c’est sur elle qu’a lieu la production ; c’est elle encore qui persiste après la destruction de la forme. En tant que matière indéterminée, elle est éternelle, et pas plus que la forme substantielle elle n’est sujette à production ou à destruction. La matière proprement dite n’est ni le feu, ni l’air, ni la terre, ni aucun des principes matériels admis par les Physiciens : le feu, l’air et la terre ne sont pas la matière pure, ils sont déjà réalisés, déterminés, ils ont une forme particulière ; la matière au contraire n’a aucune forme ; elle a pour caractère l’indétermination absolue, et tout ce qui n’a point ce caractère ne peut être appelé matière, que relativement. L’airain est la matière de la statue, le bois est la matière du lit ; ils sont indéterminés par rapport aux objets dans lesquels ils entrent comme éléments, mais ils ne sont pas absolument indéterminés, ils sont matériels et non matière : ils sont de cela, comme dit Aristote, et non point cela. La matière n’est point l’infini ou l’indéfini numérique des Pythagoriciens, elle n’est pas non plus la dyade de Platon, ou plutôt elle est tout cela et plus encore, elle est l’indéfini, l’indéterminé, sous tous ses faces, dans toutes ses acceptions. On rencontre même la matière dans la définition : elle en est la partie indéterminée, c’est-à-dire le genre, par opposition à la différence, qui spécifie et détermine l’être dont il s’agit dans la définition[1].

Sous un autre point de vue la matière est la puissance, par opposition à la forme, qui est l’acte, le résultat, le but ; et par puissance il ne faut pas entendre cause

  1. Mét., VIII.