Page:Aristote Metaphysique 1840 2.djvu/223

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suffisent, ni aucune autre substance : si cette substance ne passait pas à l’acte, il n’y aurait pas de mouvement ; le mouvement n’existerait même pas, bien qu’elle passât à l’acte, si son essence était la puissance, car alors le mouvement ne serait pas éternel, ce qui est en puissance pouvant ne se pas réaliser. Il faut donc qu’il y ait un principe tel, que son essence soit l’acte même. D’ailleurs, les substances en question[1] doivent être immatérielles, car elles sont nécessairement éternelles, puisqu’il y a certainement d’autres choses éternelles[2] ; leur essence est, par conséquent, l’acte même.

Mais ici une difficulté se présente. Tout être en acte a, ce semble, la puissance, tandis que ce qui a la puissance ne passe pas toujours à l’acte. L’antériorité appartiendrait donc à la puissance. Or, s’il en est ainsi, rien de ce qui est ne saurait exister ; car ce qui a la puissance d’être peut n’être pas encore. Et alors, soit qu’on partage l’opinion des Théologiens[3], lesquels font tout sortir de la nuit ; soit qu’on adopte ce principe des Physiciens[4] : « Toutes les choses existaient ensemble » ; des deux côtés l’impossibilité est la même. Comment y aura-t-il mouvement, s’il n’y a pas de cause en acte ? Ce n’est pas la matière qui se mettra elle-même en mouvement ; ce qui l’y met c’est

  1. Tous les principes moteurs.
  2. Les mouvements célestes.
  3. Orphée, Hésiode et les autres poètes de l’antiquité héroïque et fabuleuse. Voyez liv. I, 4. 1.1, p. 19.
  4. « En général les Ioniens et en particulier Anaxagore, au moins dans une partie de son système. » Note de M. Cousin.