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IΙ.

Il nous faut examiner en passant cette question : Est-il possible que les êtres éternels soient formés d’éléments ? Dans ce cas ils auraient une matière, car tout ce qui provient d’éléments est composé. Or, un être, qu’il soit de tout temps ou qu’il ait été produit, provient de ce qui le constitue ; d’ailleurs, tout ce qui devient sort de ce qui est, en puissance, l’être qui devient, car il ne sortirait pas de ce qui n’aurait pas la puissance de le produire, et son existence, dans cette hypothèse, serait impossible ; enfin le possible est susceptible également de passer à l’acte et de n’y point passer. Donc le nombre, ou tout autre objet ayant une matière, fût-il essentiellement de tout temps, serait susceptible de n’être pas, comme l’être qui n’a qu’un jour. L’être qui a un nombre quelconque d’années est dans le même cas que celui qui n’a qu’un jour ; et par conséquent celui-là même dont le temps n’a pas de limites. Ces êtres ne seraient donc pas éternels, puisque ce qui est susceptible de n’être pas n’est pas éternel ; nous avons eu l’occasion de l’établir dans un autre traité[1]. Et si ce que nous allons dire est une

  1. Ἐν ἄλλοις λόγοις. Αristote, par ces paroles, fait allusion, suivant commentateurs, au περὶ οὐρανοῦ. Aristote démontre en effet dans cet ouvrage, liv. I, 7, qu’aucun être en puissance ne peut rester éternellement en puissance ; que toute puissance, à un certain instant, passe nécessairement à l’acte. De Caelo, I, 7, Bekker, p. 274 sqq.