Page:Arnaud - Recueil de tombeaux des quatre cimetières de Paris, 1.djvu/28

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» Le succès de ses Géorgiques, de cette traduction qu’on s’accordait à regarder comme impossible à la poésie française, devait lui ouvrir les portes de l’Académie. On lui opposait le préjugé qui prononçait l’incompatibilité entre le fauteuil académique et la chaire de professeur. Il triompha de cet obstacle, mais il ne tarda pas à sentir la difficulté de concilier tant de devoirs ; il désira plus de loisir, il en trouva au collège de France, dont un académicien, membre estimé de l’Université, M. Le Beau, lui facilita l’entrée. Il y devait professer l’éloquence, mais il était né pour la poésie ; un échange heureux avec un de ses confrères mit tous les littérateurs de Paris à portée de profiter de ces explications poétiques, qui sortent du cercle plus étroit où doit se renfermer un professeur ordinaire, et dont peut-être il n’avait encore été donné qu’à moi seul de jouir pleinement.

» Le Collège de France a long-temps retenti des applaudissement que sa verve arrachait à de nombreux auditeurs. Le feu, l’action qu’il mettait dans ses conférences ébranlaient sa faible constitution ; il sentit le besoin de quelque repos et celui de revoir les objets les plus habituels de ses chants ; ses amis secondaient ou faisaient naître en lui ce désir ; il fut donc forcé plus d’une fois d’interrompre ces leçons, qui attiraient une si grande affluence ; il était alors remplacé par l’estimable traducteur de Perse, son ami dès long-temps, et depuis son collègue à l’Institut (M. Sélis).

» Une absence plus longue fut occasionnée par nos troubles ; quelques esprits sévères lui en firent un sujet de reproche. Sans doute il était permis de regretter qu’il ne fût pas resté à son poste ; mais en quelque lieu qu’il habitât ou bien qu’il allât chercher de nouvelles inspirations, n’était-il pas toujours le poëte de la France ? en devions-nous moins jouir du fruit de ses veilles ? Eh ! que reprocher à l’ami de la paix, qui de ses courses utiles nous rapportait les Géorgiques françaises, l’Enéide et le Paradis Perdu, l’Imagination et les Trois Règnes ?

(La suite à la Livraison prochaine.)