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sa paroisse Saint-Germain-l'Auxerrois, qui l’assista jusqu’à la mort.

Une heure avant de mourir et après deux heures d’agonie, il se réveilla comme en sursaut pour reprendre sa garde d’un mot qui n’était pas bien français à son gré, et le vicaire lui en faisant réprimande : « Je ne peux m’en empêcher, répondit-il, et je veux jusques à la mort maintenir la pureté de la langue française. »

Une leçon de clarté et une autre de correction, telles auraient été les dernières paroles de Malherbe, si, entre les deux, il n’avait chargé son valet de donner ses vieux souliers… à un Carme déchaussé.

Malherbe pouvait mourir : l’école classique française était, grâce à lui, définitivement constituée, cette école qui n’est que l’harmonieuse fusion de deux éléments, contradictoires en apparence, l’imitation et le naturel. Mais cette fusion ne se fit pas en un jour, ni même en une fois : elle fut le résultat de deux opérations, auxquelles présidèrent, à cinquante ans de distance, Ronsard et Malherbe. Le premier retrempa fortement notre pensée et notre langue dans leurs origines gréco-latines, le second naturalisa français ces emprunts étrangers. La formule de la littérature moderne était désormais trouvée en France : les hommes de génie peuvent venir, et peu importe que, pour