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Page:Arnould - Quelques poètes, 1907.djvu/131

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herbier des merveilles de la nature que du génie d’un homme par une collection de bons mots. Ménage profita largement des notes manuscrites de Racan, dans son Commentaire sur Malherbe, et Pellisson, au même temps, en use dans son Histoire de l'Académie française, tous deux conservant scrupuleusement la façon de conter de Racan, façon longuette, un peu traînante, et qui sent la grâce vieillotte du 16e siècle et des gens âgés qui ne sont plus pressés.

Le grand médisant de l’époque, Tallemant des Réaux, se jette sur ces historiettes qui sont proprement son gibier. Il en compose le portrait de Malherbe, les resserrant, les accélérant et fouettant, pour ainsi dire, la langueur de Racan de sa piquante vivacité.

La Fontaine, qui s’entend à choisir, y prend l’unique perle : la fable du Meunier, son Fils et l'Âne.

Voilà donc le célèbre poète qui commence à être dépeint, ou plutôt déshabillé par son disciple, et cette relation enfantine de Racan qui devient le fondement de la tradition biographique sur Malherbe.

On fit plus. Deux ans après la mort de Racan, en 1672, un certain abbé de Saint-Ussans eut la fâcheuse idée de publier tels quels ces Mémoires de Racan pour la vie de Malherbe dans un recueil de Divers traités d’histoire, de morale et d’éloquence. Cet exemple fit fortune, et depuis deux cents ans on n’a pu donner une édition des poésies de Mal-