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Page:Arnould - Quelques poètes, 1907.djvu/168

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QUELQUES POÈTES

Au Maine angevin Racan n’appartient pas seulement par le fait de sa naissance, mais encore par un côté de son talent.

Lorsque j’abordai la lecture de ses œuvres, je partageais l’opinion commune, à savoir qu’il est surtout un disciple et un imitateur de Malherbe ; mais à mesure que j’avançais dans cette étude, je me rendais compte qu’il se rapproche des poètes de la Pléiade, et que manifestement, en dépit de son maître, il lisait en cachette Ronsard et Desportes, et qu’il les goûtait délicieusement.

Les diverses provinces de France, ainsi que le remarque ingénieusement M. Brunetière, ont tour à tour tenu le sceptre littéraire en notre pays : au 16e siècle ce fut l’Anjou avec Ronsard et Du Bellay ; au commencement du 17e la Normandie avec Malherbe et Corneille ; en 1660, la Champagne et l’Ile-de-France. Tout contemporain qu’il fût des « Normands », il semble que Racan, par ses tendances, marque une sorte de retour de l’école angevine. Aussi ne fus-je nullement surpris de découvrir que sa naissance avait eu lieu, contrairement à ce que l’on avait cru jusqu’alors, sur la frontière de l’Anjou, dans la vallée même du Loir que l’on devrait appeler le val des poètes : le manoir de Champmarin se trouve seulement à quelques lieues en aval du manoir de la Pois-