Page:Arnould - Quelques poètes, 1907.djvu/216

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
198
QUELQUES POÈTES

gale contre les événements et les hommes ? La défaite semble assurée, et il lui prend des velléités de se retirer de l’action comme un vaincu.

Chez notre gentilhomme cette désespérance ne se tournera pas, comme on en verra plus tard des exemples, en désespoir et en suicide ; son âme est profonde, mais en même temps douce, sensée et chrétienne. Il se souvient qu’il n’a pas toujours habité ce pays de mensonges et de déceptions, qui s’appelle la cour, mais qu’il y a débarqué un jour de sa province, et que là-bas, dans un doux vallon, non loin d’un village aux paisibles habitants, dort le manoir paternel avec ses tours un peu délabrées, ses belles futaies et ses terres bien cultivées ; et du fond du Louvre où il pâtit, l’enfant transplanté de la Touraine aspire quelquefois, comme un parfum qui le réconforte, une bouffée d’air frais du pays natal. C’est là sans aucun doute qu’est marqué le refuge de son existence désemparée. Déjà, il y a dix ans, au retour de Calais, il a eu la pensée « de se retirer aux champs à faire petit pot », et il Fa écartée, imprudent qu’il était, jugeant que « ce n’était pas séant à un homme de son âge et… de sa condition », comme s’il était plus séant à un homme de sa condition et de son âge de languir à la ville, enseveli dans toutes les médiocrités. Bien des fois depuis, il est retourné passer quelque temps à la Roche pour ses affaires ou son délassement, pour soupirer en paix ses amours du Louvre, pour se retrouver. Et chaque fois, quel agrément