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Que dis-je ? malgré moi, malgré mes vains sermens,
Ai-je su maîtriser de vagues mouvemens ?
Ai-je su résister à ce charme qu’inspire
D’un souris enchanteur l’irrésistible empire,
Et l’éclat d’un regard ne m’a-t-il pas rendu
Un espoir de bonheur que je croyais perdu ?
Oui : mais lorsque bientôt de ce songe éphémère
Une affreuse clarté dissipait la chimère,
Quand d’un génie étroit les efforts impuissans
N’arrachaient à mon luth que de faibles accens,
Quand ma vue à l’erreur une fois arrachée
Retrouvait sur mes pas la misère attachée,
Quand mon amour déçu livrait à des mépris
De stériles soupirs qui n’étaient point compris,
Alors, et succombant au poids de la souffrance,
Mon âme détrompée et morte à l’espérance,
Ramenée aussitôt vers un doux souvenir,
Demandait au passé l’oubli de l’avenir :
Alors pour un moment son image exilée,
A l’heure du réveil aussitôt rappelée,
Revenait près de moi durant les mauvais jours,
Comme ces vieux amis qu’on retrouve toujours !

Oh ! qui me donnera d’aller dans vos prairies
Promener chaque jour mes tristes rêveries,
Rivages fortunés où parmi les roseaux