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LES PETITS ROMANTIQUES

tempérament du satirique. Nous avons vu que plus tôt encore, dans ses Odes, quelques vers de celle adressée à A. Lesguillon en portaient déjà la marque. Ce ne fut cependant, si nous l’en croyons, qu’à défaut d’un plus illustre qu’il s’arma du fouet de la satire. Victor Hugo, dont après 1830, les légitimistes attendaient les traits vengeurs que semblaient promettre tant de vers jadis inspirés par le plus ardent royalisme, s’était peu à peu converti à la monarchie populaire. Ce silence, paraît-il, détermina Edouard d’Anglemont. Sa préface peut faire sourire aujourd’hui, mais elle est curieuse, non seulement comme expression du sentiment personnel de l’auteur, mais surtout comme reflet de l'opinion qui existait alors dans un certain parti :

« La loyauté me force à reconnaître publiquement que le titre de ce volume est une réminiscence du grand lyrique qui, dans une de ses premières odes, le Poète dans les Révolutions[1], a répondu à la voix pusillanime de l’intérêt personnel par de si généreuses pensées et s’est écrié dans son enthousiasme sublime :

Quand le crime, Python livide,
Brave impuni le front des lois,
La Muse devient Euménide,
Apollon saisit son carquois.


Après cette noble et candide profession de foi, pouvait-on douter du poète qui avait pris possession de la faveur publique par des compositions éminemment belles, éminemment monarchiques, comme la Vendée, Quiberon, Louis XVIII… Ne devait-on pas s’attendre à voir, au milieu de la tempête révolutionnaire qui bat encore notre malheureuse patrie, M. Victor Hugo poursuivre de son courroux vengeur, comme

  1. La 1re édition des Odes, où se trouve cette pièce, est de juin 1822, sous ce titre : Odes et Poésies diverses, par Victor-M. Hugo, Paris, Pélicier, in-18.