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Les Fleurs du Mal.

communiante, inoffenſif comme une victime, il ne me déplairait pas de paſſer pour un débauché, un ivrogne, un impie & un aſſaſſin. » Ces derniers mots donnent la clef des inconſéquences dont s’indignaient les ſimples, & qui n’étaient que forfanteries & myſtifications.

Ce qui lui tenait le plus au cœur, c’était le « malentendu » qui lui avait fait attribuer par bon nombre de gens les vices & les crimes qu’il avait dépeints ou analyſés. Autant vaudrait accuſer de régicide un peintre qui aurait repréſenté la mort de Céſar. N’ai-je pas entendu moi-même un brave homme porter ſérieuſement au décompte des mérites de Baudelaire le fait d’avoir maltraité un pauvre vitrier qui n’avait pas de verres de couleur à lui vendre ? Le naïf lecteur de journaux avait pris au poſitif la fable du Vitrier dans les Poëmes en proſe ! Combien d’autres ont tout auſſi logiquement accuſé l’auteur des Fleurs du mal de férocité, de blaſphème, de dépravation & d’hypocriſie religieuſe ! Ces accuſations, qui l’amuſaient lorſqu’elles lui étaient jetées directement dans la diſcuſſion par un adverſaire irrité & dupe de ſes artifices de rhétorique, avaient fini par le laſſer lorſqu’il s’était vu compoſer une légende