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Page:Asselineau - La Double Vie, 1858.djvu/244

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surprise, moins que cela, de l’habitude ; mon auditeur ne m’avait pas compris.

Je voyais les idées que je lui avais émises se heurter dans sa pensée, confusément et sans qu’il pût les accorder.

« De la musique, faire de la musique ? Et si vous en aviez fait de la musique, elle vous aurait donc aimé, cette femme ?

— Je le présume.

— Eh bien ! il fallait en faire.

— Je ne l’ai pas pu.

— Pourquoi ? »

Je lui expliquai le mécanisme du violon et tentai de lui faire comprendre la difficulté qu’il y a à s’en servir.

« Mais qui donc fait les violons ? me demanda-t-il.

— Les hommes.

— Et ils ne peuvent pas s’en servir ?

— Il faut qu’ils l’apprennent. »

Le géant me parut d’une gaieté folle.

« Ah ! pauvre espèce ! infirmes créatures ! parler, il leur faut une langue ; chanter, il leur faut une gorge ; jouer du violon, il leur faut des doigts !

— Mais vous, lui dis-je, faites-vous donc tout cela sans difficulté ?

— Assurément, me répondit le géant avec orgueil.

— Quoi ! vous savez la musique ?

— Pardi ! la belle affaire ! Tenez, vous-même, qui venez de dépouiller toute cette chabraque mortelle