Page:Asselineau - Le Livre des ballades.djvu/143

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Ballade sur la lecture des romans
et des livres d’amour

Hier je mis, chez Chloris, en train de diſcourir,
Sur le fait des romans, Alizon la ſucrée.
N’eſt-ce pas grand’pitié, dit-elle, de ſouffrir
Que l’on mepriſe ainſi la Legende dorée,
Tandis que les romans ſont ſi chere denrée ?
Il vaudrait beaucoup mieux qu’avec maints vers du temps
De Meſſire Honoré l’hiſtoire fuſt bruſlée.
Ouy pour vous, dit Chloris, qui paſſez cinquante ans.
Moi, qui n’en ai que vingt, je pretens que l’Aſtrée
Faſſe en mon cabinet encor quelque ſejour ;
Car, pour vous deſcouvrir le fond de ma penſée,
       Je me plais aux livres d’amour.

Chloris eut quelque tort de parler ſi crûment ;
Non que Monſieur d’Urfé n’aiſt faict une œuure exquiſe
Etant petit garçon je liſois ſon roman ;