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XXI
du sonnet


Ie ſçay qu’on doit fuir les dons d’vn aduerſaire,
Toutesfois ie tous aime, & me tiens fortuné
Qu’auec tant de cordons ie ſois empriſonné :
Car toute liberté commence à me deſplaire.

O Cheueux mes vainqueurs, vantez-vous hardiment
D’enlacer en vos nœuds le plus fidelle amant
Et le cœur plus deuôt qui fut oncq en ſeruage.

Mais voyez ſi d’amour ie ſuis bien tranſporté,
Qu’au lieu, de m’effayer à vivre en liberté
Ie porte en tous endroits mes ceps & mon cordage.


Mais de tous ces Sonnets italiens, à qui la renommée, ou le goût du moment, a fait franchir les Alpes, il n’en eſt pas un qui ait obtenu plus de ſuccès que celui compoſé par Annibal Caro ſur le réveil de ſa maîtreſſe[1].

Ce Sonnet, imité lui-même d’une épigramme du poète latin Quintus Catullus, fut trouvé ſi beau en France, que tout ce qui tenait la plume, ou la lyre, ſi l’on veut, ſe piqua de le traduire.

Quelques-unes de ces traductions font devenues fameuſes ſous la dénomination commune de Sonnets de la belle Matineufe. Gilles Ménage mit le ſceau à leur célébrité en compoſant une diſſertation, adreſſée ſous forme de lettre à Conrart, dans laquelle il examina les principales pièces de ce concours.

  1. Il commence par ce vers :

    Eran l’aer tranquillo e l’onde chiare.