Je dis encore :
« Pitou !
— Mon ami !
— Ce n’est pas tout ça.
— Ah ! dit Pitou, je m’en doutais bien… Qu’est-ce qu’il y a encore, Dumanet ?
— Il y a, mon vieux Pitou, que je veux me signaler !
— Eh bien, signale-toi. Ça te fera honneur et ça me fera plaisir.
— Oui, mais je ne veux pas me signaler tout seul. Je veux que tu te signales aussi, morbleu !
— Ça, dit Pitou en appuyant son menton sur sa main, c’est à voir. Qu’est-ce que tu feras pour nous signaler ? »
Ce pauvre Pitou, c’était un ami, — et un bon, un vrai, un solide, un sûr, — mais qui n’avait pas pour cinq centimes de devinette. Il fallait tout lui expliquer depuis A jusqu’à Z.
Je lui dis :
« Pitou, regarde devant toi. Là, tu vois bien à droite des orangers et des citronniers, à gauche des champs de tabac et des vignes, et au milieu la ville, et plus loin encore la plaine jusqu’aux montagnes bleues. Est-ce assez beau, ça !
— Oui, dit Pitou, c’est magnifique tout ça ; mais ça n’est ni à toi ni à moi ! C’est à des bourgeois qui n’ont pas envie de nous en faire cadeau. »
Alors je répliquai, voyant qu’il venait de lui-même où j’avais voulu l’amener :
« Pitou, la terre est grande, et les bourgeois ne l’ont pas prise tout entière. De l’autre côté des montagnes, là-bas, au sud, il y a un pays superbe qui n’a pas de propriétaire.
— Oh ! dit Pitou étonné, pas de propriétaire ! Est-ce Dieu possible ?… Et nous pourrions l’avoir pour rien, Dumanet ?
— Presque rien. La peine de le prendre.
— C’est le désert alors, Dumanet ?… Et tu dis que c’est grand ?…