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Page:Aubert - Paix japonaise, 1906.djvu/257

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de courants, comme les arabesques grises sur les robes soyeuses des geishas. Partout des jonques à l’avant recourbé, chargées de femmes, d’enfants, de pêcheurs aux blouses bleues, aux grands chapeaux de paille en forme de ruchers — tout un petit monde affairé, entre les petits rocs, à surveiller de petites lignes. En indolentes courbes d’oiseaux pour éviter les îles, glissent des voiles blanches…

De la chambre d’une auberge, par-dessus les balcons, les enseignes de bois, les gargouilles en forme de dragons, nous regardons le quai et les barques. Temps breton : petite pluie chaude, brume nacrée, claquement sec des getas[1] dans la moiteur lumineuse. De petites filles aux cheveux luisants, aux pommettes rouges, aux vêtements clairs, s’embarquent en jasant, sous les voiles qui pendent inertes dans l’air mou : au bord de ce Morbihan semé d’îlots, on dirait des Bretonnes allant au Pardon.

La pluie redouble ; les getas montées sur deux planchettes très hautes hachent la boue menu ; des manteaux de paille hérissée cheminent en bavardant à côté de grandes ombrelles de papier jaune, où dansent en noir des caractères chinois. Et voilà qu’après avoir regardé sur le quai tous ces parasols, on dirait que sur toutes les îles du golfe, les pins à têtes rondes sont aussi de grandes ombrelles, ouvertes contre la pluie…

  1. Socques de bois.