Page:Audiat - Bernard Palissy : étude sur sa vie et ses travaux.djvu/348

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laissé dans l’ombre. C’est un peu la faute de Palissy lui-même, d’abord : car la découverte de l’émail blanc est le seul but déterminé et nettement indiqué qu’il se soit proposé. Le reste de ses occupations nombreuses et de ses travaux divers semble n’avoir été qu’un accessoire dans sa longue existence. C’est ensuite un des inconvénients des sciences naturelles. Elles sont progressives ; les connaissances d’hier amènent les théories de demain ; les découvertes s’accumulent, et celles d’aujourd’hui enterrent complètement celles de l’an passé. Là surtout s’applique le refrain de François Villon :

Où sont les neiges d’antan ?

Les plus étonnants systèmes n’étonnent plus : ils sont devenus banals. L’élève le plus ignorant les sait, et les répète sans se douter de leur étrangeté. De là vient qu’en lisant les écrits des savants antérieurs, nous ne sommes nullement frappés des vérités qu’ils contiennent, mais vivement choqués des erreurs qu’on y rencontre. Il faudrait pour juger sainement se dégager des connaissances actuelles, se porter par la pensée au milieu de l’époque où vécut le savant, connaître exactement ce qu’on savait autour de lui. Alors ses fausses hypothèses n’offensent plus autant notre science de fraîche date ; les découvertes faites ou les inventions entrevues que les siècles suivants ont vulgarisées, complétées, mises en pleine lumière, excitent notre admiration. Mais combien est difficile ce travail ! Voilà pourquoi, à part une ou deux que des hommes éminents, Réaumur,