Page:Audoux - De la ville au moulin.djvu/61

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

de foin et de fougère sèche des corbeilles faites exprès. On plaçait leur nid très bas, dans une pièce bien close afin que rien ne vînt les distraire ou les tourmenter. Chaque matin on les aidait à quitter leurs œufs pour les mener prendre l’air et manger une pâtée préparée spécialement pour elles ; puis la promenade et le repas terminés on les faisait rentrer avec mille précautions. Tout cela pour que la poule amenât, le plus souvent, une dizaine de poussin sur seize ou dix-huit œufs qu’on lui avait confiés.

En quittant le hangar, je m’arrêtais auprès de l’intelligente poule ; j’avais envie de lui parler, comme à quelqu’un.

Et les jours suivants, courbée de nouveau derrière l’homme à la faux, je me répétais les paroles d’oncle meunier.

« Avec de l’amour et du courage on peut beaucoup. »

Et malgré le soleil qui semblait vouloir fondre mes os, malgré les épis durs qui déchiraient mes paumes, et me griffaient au visage, ma pensée s’emplissait d’espoir et de projets qui arrangeaient toute chose.