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Page:Audoux - Douce Lumiere.djvu/213

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avait fait sa joie de petite fille : des fondrières et des haies, des fossés à franchir et des buttes à escalader. Elle rentrait à la maison, les mains saignantes, les jambes couvertes d’éraflures et les pieds pleins d’épines que Christine arrachait patiemment de ses petites mains adroites. Elle refusait obstinément la compagnie de Raymond qui s’offrait à la guider par des chemins où l’on pouvait marcher sans se blesser. C’est que seule, dans ses courses à l’aventure, elle pouvait laisser courir sa pensée autant que ses jambes. Elle avait tout de suite imaginé que Noël était dans l’île, et qu’elle allait le rencontrer, ici ou là. Elle en arrivait, par instant, à croire réellement à cette présence. Une émotion arrêtait net sa marche et la laissait le cœur tout tremblant. « C’est bien Noël qui fait signe, là-bas ? Non, c’est une pierre de forme bizarre. Et cet homme au loin, dormant en plein soleil ? Non, c’est un petit arbre renversé par la tempête. »

Les jambes lourdes, elle s’étend alors, les mains jointes sous sa tête et les yeux fermés, afin que rien ne vienne la détourner de son rêve. Derrière ses paupières closes, tout se détruit et renaît. Son corps devient une plante de la sapinière de Bléroux, trans-