Page:Audoux - Douce Lumiere.djvu/40

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bleuâtres, et interrogea, comme à une leçon :

— Qui t’a fait ça ?

— Personne.

— Est-ce que tes camarades te pincent ?

— Non.

— Pourtant quelqu’un t’a pincé aujourd’hui, les marques sont toutes fraîches ?

— Non, personne.

La maîtresse regarda longuement celle qu’elle appelait gnangnan. Après ce qu’elle venait de voir, elle ne savait que penser de ces yeux baissés, de ces lèvres serrées, et de l’ennui profond qui s’étendait comme toujours sur ce petit visage, et le faisait morne jusqu’à l’indifférence. Mais lorsqu’elle se leva pour partir, elle vit nettement frémir les ailes du petit nez. Une pitié lui vint. Elle dit doucement :

— Lorsque tes compagnes te font du mal, il faut me le dire, je les punirai.

La petite baissa un peu plus la tête et rabattit sa manche.

Avant de s’éloigner, Mlle Charmes dit encore :

— À partir de demain, ce sera Marguerite Dupré qui te fera lire !

Cette fois, Douce releva vivement le front et ouvrit tout grands ses trop grands