Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/17

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À mon arrivée, le patron avait tout de suite coupé mon nom en deux. Ses joues s’étaient gonflées pour accentuer la moquerie pendant qu’il disait :

— Marie-Claire ? Deux noms à la fois ? Eh bé… vous êtes épatante, vous.

Et en rejetant son souffle comme s’il éloignait de lui une chose trop compliquée, il avait ajouté d’un ton sérieux :

— On vous appellera Marie. Cela sera bien suffisant.

Mais cela ne fut pas suffisant. Je répondis si mal à ce nom qu’il fallut bien rendre au mien sa première forme.


Mme  Dalignac revint plus tôt qu’on ne s’y attendait. Elle rapportait un énorme carton dont le couvercle se soulevait malgré les ficelles qui le retenaient.

Le patron s’empressa de l’ouvrir. Il toucha les tissus avec une petite grimace de contentement.

— De la soie, rien que de la soie, disait-il. Sa femme l’éloigna :

— Laisse… tu vas tout embrouiller.

Puis en s’adressant à nous :

— C’est pour un mariage.

Elle s’assura que le carton reposait tout entier sur la table et elle sortit une à une, les pièces d’étoffes, en désignant leur emploi.

— Une robe noire pour la mère de la mariée… Deux robes bleues pour les grandes sœurs… Des