Page:Audoux - La Fiancee.djvu/214

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Deux hommes se saisirent de grand’mère et la couchèrent de force ; ils mirent deux larges planches de chaque côté de son lit et la gardienne de nuit s’installa près d’elle ; à tout instant grand’mère se dressait du fond de ses planches et c’était comme si elle essayait de sortir de son cercueil.

Pendant longtemps elle continua de faire des signes d’appel, puis ses bras restèrent immobiles et on n’entendit plus que sa plainte qui disait sans relâche : « Y a des loups ! » Cela montait comme un cri de frayeur qui semblait emplir toute la salle. Vers le matin la voix claire se fit plus faible, on eût dit qu’elle s’était usée. Elle traîna quelque temps, lente et triste, puis douce et fragile comme celle d’un tout petit enfant, et quand le jour parut, elle se cassa en disant encore : « Y a des loups ! »