Page:Audoux - La Fiancee.djvu/220

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mais deux êtres qui s’aimaient tendrement.

Mais il n’y eut pas de retour au petit café. Ce fut dans un tout autre quartier de Paris et dans un appartement sombre que la douce infirme retrouva son père et sa mère, irrités, peinés, l’accusant d’avoir fait le malheur de leur vie en même temps que le sien propre.

Devant leur tristesse et leurs reproches, elle courbait le front et s’accusait elle-même d’ingratitude, mais elle oubliait vite ses torts en regardant le beau lait blanc qui coulait de son sein et faisait si fraîches les joues de son petit enfant.

Et puis, pour la délivrer de ses remords il y avait encore la vieille servante qui lui parlait comme à une victime et non comme à une coupable. La bonne créature savait faire renaître l’espoir aux heures de profond chagrin.

— Patience, patience, disait-elle, Jean le Perdu saura bien nous retrouver.

Le changement de vie, la colère, l’inaction avaient rapidement brisé la belle santé des parents. Ils étaient morts à peu de distance l’un de l’autre sans que leur fille ait obtenu un seul mot de pardon.