Page:Audoux - La Fiancee.djvu/56

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pour le jour où il s’en irait en terre. C’était un chêne dont on ne savait pas l’âge et qui pouvait abriter vingt hommes, de la pluie ou du grand soleil. Il ne l’emporte pas tout entier, non, il n’en fallait pas tant pour loger les os de ce vieux sec, et ses héritiers trouveront des planches au grenier, mais pour sa carcasse de mauvais riche, il a voulu le cœur, et il a bien fallu l’enterrer avec, puisqu’il l’avait ordonné.

À partir de ce jour l’ennui disparut de la maison du Clos comme si on l’avait enfermé en même temps que le châtelain dans la boîte en plomb. Nestin et Nestine avaient de quoi entretenir leurs causeries. Cet enterrement qui ne ressemblait à aucun autre et qu’ils ne manquaient jamais de comparer à ceux du passé comme à ceux du présent, les laissait dans une sorte de révolte qui ne s’apaisait pas. Certes, beaucoup d’autres étaient partis et partaient encore, tout habillés de chêne, pour le grand voyage. À cela ils ne trouvaient pas à redire, mais ce cœur de chêne enfoui à l’endroit même où il était né, que l’humidité allait tout de suite ternir et