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MARIE-CLAIRE

Je levai les yeux sur lui pour dire que je me sauverais encore s’il ne voulait pas me conduire vers sœur Marie-Aimée. Je continuai de le regarder en attendant sa réponse, et je vis bien qu’il était embarrassé. Il resta un long moment à réfléchir ; puis, il me dit en mettant sa main sur mon genou :

— Écoutez-moi, ma petite, et tâchez de comprendre ce que je vais vous dire.

Et quand il eut fini de parler, je sus qu’il avait pris l’engagement de me garder jusqu’à l’âge de dix-huit ans, sans jamais m’emmener à la ville. Je sus aussi que la supérieure avait tous les droits sur moi, et que, si je me sauvais encore, elle ne manquerait pas de me faire enfermer sous prétexte que je courais les bois toute seule pendant la nuit. Il termina en disant qu’il espérait que j’oublierais le couvent, et que je me prendrais d’affection pour lui et sa femme, qui ne voulaient que mon bien.

J’étais très troublée, et je retenais une grosse envie de pleurer.

— Allons, dit le fermier, en me tendant la main, soyons bons amis, voulez-vous ?