Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/105

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reux, à genoux, au bord de la vaste et paisible rivière qui étincelle sous les rayons du soleil, et bientôt aussi viendront l’y chercher les regards de ses semblables ; car, à la pointe de ce cap couvert de taillis et de broussailles, s’avance fièrement un petit bateau lancé par de vigoureux rameurs. Le perdu élève sa faible voix et pousse un cri perçant, suprême effort de joie et d’agonie. — Les rameurs s’arrêtent ; ils regardent autour d’eux. — Encore un cri, mais défaillant !… Ils l’ont aperçu… Ils viennent ! Son cœur palpite, sa vue se couvre, sa tête se perd, la respiration lui manque… Ils viennent toujours ; ils approchent ; les voilà sur le bord, et le malheureux est retrouvé !

Ceci n’est point un conte fait à plaisir, mais le récit d’une aventure réelle qui aurait pu sans doute être embellie, mais qui n’en vaut que mieux, sous son simple habit de vérité. Les notes qui devaient servir à me la rappeler ont été écrites dans la cabane même du bûcheron, environ quatre ans après le triste événement, en présence de son aimable femme et de ses chers enfants ; je vois encore les larmes tomber de leurs yeux, en l’écoutant ; et cependant il leur était, depuis longtemps, plus familier qu’une histoire redite pour la troisième fois. Mon désir sincère, cher lecteur, est que ni vous ni moi, au prix de telles souffrances, n’excitions jamais pareille sympathie, bien qu’elle en dût être, néanmoins, une douce et précieuse récompense.

Il me reste seulement à dire que, de la cabane du bûcheron au lieu où il voulait se rendre, il y avait à peine huit milles ; tandis que l’endroit de la rivière où il fut trouvé