Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/149

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effrayante. Çà et là, quand un arbre était trop pressé contre un autre, on entendait un bruit de craquement semblable à celui que produisent les violentes rafales qui parfois rasent la surface du sol. M’étant instinctivement tourné dans la direction d’où soufflait le vent, je vis avec stupéfaction les plus nobles arbres de la forêt courbant un moment leur tête majestueuse, puis, incapables de résister à la tourmente, tombant, ou plutôt volant en éclats. D’abord, c’était un bruit de branches qui se cassaient ; puis, avec fracas, se brisait le haut des troncs massifs ; et dans beaucoup d’endroits, des arbres entiers, d’une taille gigantesque, étaient précipités tout d’une pièce sur la terre. Si rapide fut la marche de l’ouragan, qu’avant même que j’eusse songé à prendre des mesures pour ma sûreté, il était passé à l’opposite de l’endroit où je me tenais. Jamais je n’oublierai le spectacle qui, à ce moment, me fut offert : je voyais la cime des arbres s’agiter de la façon la plus étrange, tourbillonnant au centre de la tempête, dont le courant entraînait pêle-mêle une telle masse de branches et de feuillage, que la vue en était totalement obscurcie. On voyait les plus gros arbres ployés et tordus, sous l’effort du vent ; d’autres, d’un seul coup, rompus en deux, et plusieurs, après quelques moments de résistance, déracinés et bientôt jonchant la terre. Toute cette masse de branchages, de feuilles et de poussière soulevée dans les airs, tournoyait, emportée comme une nuée de plumes ; et quand elle était passée, on découvrait un large espace rempli d’arbres renversés, de tiges dépouillées et de monceaux d’informes