Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/151

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obligé de conduire mon cheval par la bride, pour lui faire franchir les monceaux d’arbres, tandis que moi, je me cramponnais par-dessus, ou rampais par-dessous, du mieux que je pouvais ; par moments si bien empêtré au milieu des cimes brisées et du fouillis des branches, que je croyais véritablement y rester.

Quand je fus arrivé chez moi, je racontai ce que j’avais vu ; et à ma grande surprise, on me dit que dans le voisinage on n’avait ressenti que très peu de vent, bien que dans les rues et les jardins on eût vu tomber beaucoup de grosses et de petites branches, sans pouvoir se rendre compte d’où elles venaient.

Après le désastre, il circula dans le pays plusieurs récits effrayants : entre autres, on disait que nombre de maisons de bois avaient été renversées de fond en comble et leurs habitants détruits, qu’une personne avait trouvé une vache enfoncée entre deux branches d’un gros arbre à moitié brisé… Mais comme je ne veux rapporter que ce que j’ai vu de mes propres yeux, et non vous égarer au pays des fables, je me contenterai de dire qu’un dommage énorme fut causé par cet épouvantable fléau. Aujourd’hui encore la vallée n’est plus qu’un lieu désolé, encombré de ronces et de broussailles se mêlant aux cimes et aux troncs des arbres dont la terre est jonchée, et où se réfugient les animaux de rapine, lorsqu’ils sont poursuivis par l’homme ou qu’ils viennent de marauder sur les fermes des environs.

Depuis lors, j’ai traversé le chemin parcouru par la trombe : une première fois, à la distance de deux cents