Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/153

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attirer mon attention était la multitude de canards de diverses espèces qui, en compagnie de nombreuses troupes de cygnes, nous dépassaient de temps à autre. Mon patron, un Canadien, avait fait pendant plusieurs années le commerce des fourrures ; c’était un homme de beaucoup d’intelligence, et comme il s’était aperçu que ces oiseaux avaient captivé ma curiosité, il semblait désireux de trouver quelque nouvel objet pour me distraire. Un aigle s’envola au-dessus de nous. « Ah ! quel bonheur, s’écria-t-il, voilà ce que je cherchais : regardez donc, monsieur, le grand aigle ; c’est le seul que j’aie vu depuis que j’ai quitté les lacs ! » À l’instant je fus sur pied, et après l’avoir examiné attentivement, je conclus, en le perdant de vue dans le lointain, que c’était une espèce entièrement nouvelle pour moi. Mon patron m’assura qu’en effet de tels oiseaux étaient rares ; que quelquefois ils suivaient le chasseur pour se repaître des entrailles des animaux qu’il avait tués, lorsque les lacs étaient gelés ; mais qu’en d’autres saisons ils plongeaient, pendant le jour, après le poisson, et l’enlevaient dans leurs serres à la manière de l’orfraie ; que généralement ils se tenaient sur les plates-formes des rochers où ils bâtissaient leurs nids, et qu’enfin plusieurs de ces nids lui avaient été indiqués par la quantité de fiente blanche éparse au-dessous.

Pour moi, convaincu que cet oiseau était inconnu aux naturalistes, je ressentis un vif désir de me renseigner sur ses habitudes, et d’apprendre par quelles particularités il pouvait différer des autres. Mais ce ne