Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/243

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verts ; les pins et les magnoliers[1] étaient chargés de fruits brillants, et les sapins du Canada projetaient sur la terre une ombre qui eût très bien fait pour le fond d’un moelleux tableau. La seule chose qui nous frappât désagréablement, était le retard des récoltes. Cependant l’herbe attendait une seconde coupe ; mais les pêches étaient encore toutes petites et toutes vertes, et en passant devant les différentes fermes, c’est à peine si nous voyions çà et là quelques personnes occupées à moissonner les avoines. Enfin, nous arrivâmes en vue de la Crique aux Français, et bientôt après à Meadville. Une fois là, nous payâmes les cinq dollars promis à notre conducteur, qui immédiatement tourna bride, appliqua un vigoureux coup de fouet à ses chevaux, et partit en nous disant adieu.

Il ne nous restait plus alors qu’un dollar et demi ; nous n’avions pas de temps à perdre. Nous nous remîmes, personnes et bagages, à la garde de M. J. E. Smith, aubergiste, à la halte des voyageurs, et sans tarder, commençâmes notre tournée d’inspection à travers le petit village qui allait être mis à contribution pour nos besoins ultérieurs. L’apparence nous en parut assez triste. Mais, grâce à Dieu, je n’ai jamais su ce que c’était que de désespérer. N’est-ce pas Dieu, en effet, qui m’a soutenu, pendant tout le cours de ces voyages que je n’ai entrepris que pour lui rendre témoi-

  1. « Cucumber-tree » (Magnolia acuminata), dont les capsules, formant un cône allongé, prennent en effet une couleur pourpre en mûrissant.