Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/399

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fronter des difficultés comme celles-là, c’était faire preuve d’une énergie peu commune, et vous ne pourrez vous empêcher de reconnaître que la récompense dont jouirent ces colons vétérans avait été bien méritée.

Il y en avait cependant qui abandonnaient les rivages de l’Atlantique, pour ceux de l’Ohio, avec plus de confort et de sécurité : ils emmenaient leurs charrettes, leurs nègres et leur famille. Un jour à l’avance, des hommes armés de haches frayaient le passage au travers des bois ; et quand la nuit était venue, les chasseurs attachés à l’expédition se dirigeaient vers le lieu que l’on avait désigné pour le campement, ployant sous le gibier que la forêt leur procurait en abondance. L’éclat d’un grand feu guidait leurs pas, et à mesure qu’ils approchaient, un bruit de vie et de gaieté, saluant leurs oreilles, leur annonçait que tout allait bien. Bientôt la chair du buffle, de l’ours et du chevreuil était suspendue devant la braise, en larges et délicieuses grillades ; les gâteaux préparés étaient mis en place et cuisaient à point sous le rôti succulent dont ils recevaient le riche jus, et chacun alors ne songeait qu’à se réjouir, après les fatigues de la journée. Les charrettes portaient les lits, on dételait les chevaux qu’ensuite on lâchait pour qu’ils pussent se refaire au milieu du taillis ; à quelques-uns peut-être on attachait les jambes ; mais la plupart n’avaient qu’une clochette au cou, pour permettre au maître de les retrouver au matin.

Ainsi s’avançaient joyeusement ces bandes d’émigrants qui vivaient dans une cordiale union, n’ayant point à craindre de plus grands obstacles, tandis qu’au