Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/50

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fonçais à moitié sous l’eau, poussais doucement les oiseaux, premièrement dans les bords, et enfin jusque dans la poche. De cette manière, j’en ai pris un nombre considérable de jeunes et de vieux. L’autre méthode me fut enseignée, comme par hasard, dans une chasse au fusil, avec un excellent chien d’arrêt. Je remarquai qu’à la vue seule de ce fidèle animal, les jeunes canards fuyaient précipitamment vers la rive, les grands, de leur côté, prenant l’essor dès qu’ils croyaient leur couvée en sûreté ; mais aussitôt Junon s’élançait à l’eau, traversait l’étang ou le marais, et ayant atteint le bord opposé, partait au galop sur leur trace. Quelques instants après, je la voyais revenir m’apportant doucement un caneton que je lui prenais dans la gueule, sans qu’elle lui eût fait le moindre mal.

Lorsque je demeurais à Henderson, j’eus l’idée d’apprivoiser plusieurs de ces oiseaux ; et, en quelques jours, Junon m’en eut procuré autant que j’en pouvais désirer. J’en mis une douzaine ou plus dans un filet, les emportai chez moi et les enfermai dans des barils à farine que je tins recouverts pendant les premières heures pour les accoutumer plus vite. Quelques-uns de ces barils étaient placés dans la cour, et chaque fois que je venais en lever le couvercle, j’apercevais tous mes petits canards grimpés, à l’aide de leurs griffes aiguës, jusqu’au haut de leur prison. Dès qu’ils trouvaient place où se faufiler, ils faisaient la culbute par-dessus le bord et décampaient dans toutes les directions. C’est une manœuvre que je leur vis exécuter bien souvent : ils montaient petit à petit du fond de la barrique, ga-